Nous avons laissé René et Marie NAYEL en 1924 à Brest, après l’annonce du décès à Madagascar de Marguerite - la sœur de Marie -. Elle était la maman du jeune Louis (11 ans) dont ils ont la charge depuis son entrée en 6e l’année précédente.
Continuons à suivre René grâce aux pièces conservées dans son dossier professionnel aux archives départementales d’Ille-et-Vilaine. Depuis le début de sa carrière, il vise le provisorat, et continue à gravir patiemment les marches pour y accéder.
Purgatoire à Brest
Censeur au lycée de Brest depuis septembre 1923, il brigue le même poste « dans un lycée hors classe [souligné], de préférence Nantes, Lyon, Toulouse, Bordeaux. »
Les appréciations annuelles du proviseur appuient cette ambition, d’autant qu’on y devine, au regard des tensions de l’année précédente, le souhait de hâter cette mutation : « A Brest depuis 2 ans. Connait bien tous les détails du service et s’en acquitte avec conscience et régularité. Excellente éducation. Tempérament calme et réfléchi. N’a que de très bons rapports avec les familles et avec les fonctionnaires placés directement sous son contrôle. Assure dans le grand lycée une discipline constante, sans brusquerie, ni faiblesse. Non agrégé, M. NAYEL ne peut être encore proposé pour le provisorat ; la présence d’un directeur au petit lycée prive le censeur de donner la pleine mesure de ses moyens en ne laissant sous son contrôle que l’effectif d’un lycée de 450 élèves. M. NAYEL a bien réussi à Brest. Pour toutes ces raisons, je propose sa nomination dans un lycée à gros effectif. » (16 avril 1925)
Cela ne suffit pas. Pour l’administration, prime le besoin de mettre durablement à l’épreuve les cadres de l’enseignement.
« Exerce les fonctions de censeur depuis 7 ans, à Brest depuis 3 ans. Connait bien tous les détails de l’administration et possède parfaitement tous les règlements ; a collaboré intelligemment avec son proviseur à l’occasion de l’application des nouveaux programmes. Calme et mesuré dans son action disciplinaire. Entretient un bon état d’esprit parmi les élèves du grand lycée. A d’excellents rapports avec les familles et avec les fonctionnaires. Montre de l’initiative et une activité suffisante. Est capable de rendre des services dans un lycée plus important. » (30 mars 1926)
« A conservé les qualités de calme et de courtoisie qui font de lui un bon intermédiaire entre les fonctionnaires ou les familles et le Proviseur. Très au courant des règlements administratifs, connaissant bien le lycée. Rend de services et mérite, après 4 ans de séjour à Brest, d’exercer son activité dans un lycée plus grand. » (7 mai 1927)
Qu’elles soient portées par le proviseur, l’inspecteur ou le recteur, les appréciations s’inscrivent dans l’art de la rhétorique administrative “disant sans dire, tout en ne disant pas ce qu’elle devrait dire”, glissant avec talent - parfois dans une même phrase - de propos laudatifs à la mise en lumière de points faibles annulant le propos précédent.
« Après quelques hésitations l’an dernier dues à une certaine lenteur d’adaptation, M. NAYEL s’est nettement ressaisi (…). C’est un caractère droit et calme, un esprit pondéré d’une envergure moyenne. Je crois qu’on peut lui confier un lycée à gros effectif pour qu’il puisse donner toute sa mesure avant d’être nommé proviseur, mais il peut sans difficulté se mûrir à Brest encore un an au moins. Situation de famille particulièrement intéressante. » (l’inspecteur, 5 mai 1925)
« Je crois au contraire qu’il n’y a aucun inconvénient à maintenir M. N. encore un an. Il n’y en aurait pas davantage à l’envoyer dans un grand lycée. Le changement d’air pourrait être favorable. Dans un milieu neuf, il permettra enfin de voir s’il s’impose comme proviseur. » (le recteur, 5 mai 1925)
« Je m’associe aux éloges que fait M. le proviseur en ce qui concerne la compétence administrative et l’action disciplinaire de M. NAYEL. Cependant, il me semble un peu effacé et ne pas posséder les qualités voulues pour faire un chef d’établissement. Par contre, je crois qu’il peut rendre des services dans un grand lycée comme censeur. » (l’inspecteur, 2 avril 1926)
René connait suffisamment l’administration pour savoir qu’il faut aller au-delà des rapports annuels pour appuyer ses demandes. En mars 1926, sous couvert de son proviseur, il demande audience au recteur :


La réponse du recteur est rapide “Écrivez lui de venir mardi”. Aucune mutation ne suit néanmoins l’entretien. Il est vrai que les postes sont prioritairement réservés aux agrégés, ce qui n’est pas le cas de René.
“Cette ville de marins où la vie est souvent assez débraillée, où la discipline doit donc être constamment surveillée…”
Une nouvelle année s’engage donc à Brest. Les rapports d’inspection se font plus rapprochés et surtout plus engagés : « M. NAYEL n’a rien du censeur adjudant. C’est un homme instruit, d’une parfaite correction de manières. Il impose son autorité par une vigilance toujours en éveil qui ne laisse pas passer une faute sans la réprimer mais qui s’attache à prévenir plutôt qu’à punir. Il a une grande action sur les maîtres comme sur les élèves. Il est respecté. Il serait aussi bien à sa place dans le lycée hors classe qu’il souhaite qu’au lycée de Brest. » (14 février 1927)
« Je transmets la demande de M. le Censeur. Le censeur se présente bien. Il fait valoir les bons résultats qu’il a obtenus au lycée de Brest en les opposant aux difficultés particulières de sa tâche en cette ville de marins où la vie est souvent assez débraillée, où la discipline doit donc être constamment surveillée, où il reste beaucoup d’élèves dont le travail n’est pas contrôlé en dehors du lycée. » (2 mars 1927)
« Peut être affecté à un lycée plus important. Vient de faire ses preuves au lycée de Brest dans des conditions fort honorables. » (9 mai 1927)
René met les bouchées doubles afin d’avoir tous les atouts de son côté.
« Brest, le 8 août 1927, Monsieur le Recteur, J’ai été très touché de la lettre par laquelle vous avez bien voulu m’adresser vos remerciements pour la part que j’ai prise aux examens du baccalauréat de la dernière session. J’ai été très heureux de pouvoir rendre un service, dans la mesure de mes moyens, aux Facultés et à l’académie de Rennes. C’est en effet dans cette académie que j’ai fait toutes mes études et la plus grande partie de ma carrière. Je n’oublie pas la bienveillance que j’y ai toujours rencontrée. Veuillez agréer (...) ».
Août 1927 : la nomination tant attendue arrive enfin !
« Monsieur le Recteur, je viens de recevoir un avis m’annonçant que Monsieur le Ministre me nommait censeur des études au lycée de Nantes. Je sais la grande part que vous avez dans le choix flatteur dont je suis l’objet et je vous prie de bien vouloir trouver ici l’expression de ma profonde gratitude. Ma satisfaction est grande d’avoir obtenu le poste de Nantes (…)”
La famille aménage à Nantes, au lycée Clémenceau.
A nouvel établissement, nouvelles inspections… Le positionnement est prudent.
« J’ai déjà vu cette année M. NAYEL à Brest. Il a été vraiment comblé par sa nomination à Nantes. Il est d’ailleurs très bien disposé à faire je crois tout ce qui est en son pouvoir pour mériter en tout point la faveur dont il est l’objet. Il a produit bonne impression à son proviseur qui cependant l’étudie encore et aurait tendance à ne pas le trouver assez jeune de tempérament, assez avisé et ingénieux. » (l’inspecteur général, 16 août 1927)
« N’est au lycée que depuis la rentrée d’octobre. S’adapte peu à peu à son nouveau service. Manifeste de bonnes intentions. » (le proviseur, 19 février 1928)
« Réussira, comme à Brest. Mais il est douteux qu’on puisse en faire un proviseur. » (le recteur, 5 avril 1928)
« M. NAYEL est au lycée de Nantes depuis moins de 6 mois, venant de Brest. Il a eu quelque peine à se mettre au courant de son nouveau service. Les « frottements de départ » ont été assez sérieux. Mais aujourd’hui, la période d’adaptation est franchie… Il serait exagéré de dire qu’il est un censeur de 1er plan. C’est un homme de bonne tenue, qui parle assez bien mais qui ne donne pas l’impression d’avoir beaucoup d’envergure. » (inspection, 13 mars 1928)
Nouveau couac…
“Vous ferez observer à M. le Censeur NAYEL qu’il a eu tort de ne pas de ne pas prévenir son Proviseur de l’accident CARNAC. Il aurait dû au contraire d’autant plus s’en empresser, que l’auteur de l’accident est son propre neveu. (Le Recteur de l’Académie à Monsieur l’Inspecteur d’Académie à Nantes, 26 juin 1928)”


“L’accident CARNAC” n’empêche pas René de garder son objectif. Il sollicite chaque année : « (…) un poste de proviseur de préférence dans les académies de Rennes, Poitiers ou Caen » ou « de préférence Lorient ou Pontivy, mais accepterait toute autre résidence, également en Alsace-Lorraine. » (notices individuelles 1930, 1931).
Le rapport du proviseur reste mitigé : « Me parait avoir beaucoup des qualités de proviseur dans un lycée : est bien élevé, très correct, affable ; est aimé des enfants qu’il connait vite et bien ; est apprécié des familles mais manque un peu d’initiative et de fermeté, et je crains qu’il ne fasse front assez difficilement dans des circonstances qui exigeraient une décision prompte et énergique » (15 janvier 1929). « Exerce ses fonctions avec beaucoup d’affabilité, de calme et pondération ; bonnes relations avec les fonctionnaires et les parents.. A assez d’autorité sur les élèves ; un peu lymphatique, ne manque cependant pas de confiance en lui-même : sera certainement un bon proviseur de petit lycée. » (20 janvier 1930)
René peut en revanche compter sur celui des inspecteurs ou du recteur :
« M. NAYEL a plus d’autorité que l’on pense. Il a une mémoire sûre, connait bien les élèves. Il est apprécié. Mme NAYEL, ancien professeur, a de la distinction et une tenue parfaite. Avis favorable pour un provisorat. » (l’inspecteur, 1929)
« Monsieur NAYEL présente bien. Il connait les enfants, sait leur parler, a sur eux de l’autorité et entretient d’excellentes relations avec les familles et les professeurs. Il ferait, je crois, un bon proviseur. » (inspection générale, mars 1930)
Il faut quelques années pour que le chef d’établissement se rallie à ces avis, et que tous les avis convergent : « Demande un poste de proviseur. Correct, calme, très affable et ayant beaucoup de liant, connait bien les enfants, entretient de bonnes relations avec le personnel et les familles, a l’expérience des questions administratives. Est persuadé lui-même qu’il peut être un bon proviseur. Je le crois aussi. » (1er octobre 1931)
« Je ne peux que confirmer en tous points les appréciations de M. le proviseur. M. NAYEL sera un bon proviseur. A mon avis, on pourrait lui confier de préférence un poste dans la région bretonne qu’il connait bien. » (l’inspecteur, 16 avril 1931)
« M. NAYEL réussit à Nantes. M. l’inspecteur d’académie de la Loire-Inférieure et M. le proviseur du lycée Clémenceau s’accordent à faire son éloge et l’impression qu’il produit ne dément pas le témoignage de ses chefs directs. La tenue de M. NAYEL est excellente, son autorité semble bien établie dans la maison. Collaborateur d’un proviseur qui ne hait pas la manière forte, il facilite l’exécution du service par son humeur égale et son affabilité. Il y a de l’ordre dans les études, le travail y est réglé avec soin et surveillé comme il convient par les répétiteurs. Vœux : un poste de proviseur, à la disposition de M ; le Ministre, aussi en Alsace-Lorraine. Pas d’opposition. » (inspection générale, 28 février 1931)
En plus de ses fonctions professionnelles, René assure - au moins durant cette période nantaise - la fonction de “délégué pour l’académie de Rennes de l’association amicale des censeurs des lycées nationaux”. C’est à ce titre qu’il écrit au recteur, toujours avec la même déférence : “Monsieur le Recteur, Renouant avec une tradition négligée depuis quelques années, les censeurs (..) de l’académie ont l’intention de se réunir à Rennes au début des prochaines vacances de Noël pour discuter de leurs intérêts matériels et moraux, et de toutes questions professionnelles dignes de retenir leur attention. Nous tiendrons dans cette circonstance, Monsieur le Recteur, à vous présenter de vive voix les assurances de notre respectueux dévouement et à vous mettre au courant des résultats de nos échanges de vues ? J’ai donc l’honneur de solliciter de votre bienveillance la faveur d’une audience collective (…). Après consultation de tous les collègues – car il est nécessaire de tenir compte du service que chacun de nous a à assurer – il apparait que la date qui nous serait la plus favorable est la matinée du 27 décembre. Nous serions particulièrement heureux si ce jour pourrait vous agréer. Vous vouliez bien nous recevoir habituellement vers 11 heures. Il va sans dire que si la date du 27 décembre n’était pas à votre convenance, nous choisirions pour nous réunir un autre jour qui vous soit plus commode. Dans l’espoir que vous voudrez bien accueillir ma requête avec bienveillance, j’ai l’honneur de… (13 décembre 1929) ».
Revoir la Normandie
Nul doute que cet engagement joue en sa faveur. Le provisorat arrive enfin durant l’été 1931. « Je viens de recevoir ma nomination de Proviseur au lycée d’Alençon. J’ai l’honneur de vous faire connaitre que j’accepte très volontiers ce poste. Vous avez été appelé, je crois, cette année à noter les personnels de votre académie. Permettez-moi de vous remercier de l’influence que vos notes ont pu avoir sur la décision de monsieur le Ministre à mon égard et la confiance qu’il veut bien me témoigner. Je tiens très vivement, Monsieur le Recteur,D à ne pas quitter l’Académie de Rennes où j’ai passé tous mes examens et où j’exerce depuis 1913 comme professeur et censeur des études, sans vous présenter personnellement mes respects. (…) (7 août 1931) »

Du fait de ce poste à Alençon, c’est aux archives départementales du Calvados (siège du Rectorat de Caen) que l’on pourrait trouver les éléments concernant sa carrière entre 1931 et 1937. C’est en effet à Lorient qu’il est nommé durant l’été 1937… Ce qu’il espérait depuis toujours !
Dupuy-de-Lôme : un bâton de maréchal
Cette nominations arrive arrive quelques semaines après le décès de Joseph LE COZ, le père de Marie (18 mai) qui ne saura donc pas que son gendre allait prendre la direction du lycée où il avait été lui-même professeur durant plus de 30 ans. Antoinette GAUTHIER, la veuve d’Auguste NAYEL meurt en juillet, juste après le retour définitif de son fils de Madagascar. Louis s’installe avec ses 3 filles à Lorient. Les enfants ont grandi. Aline a eu sa licence de lettres classiques et s’est fiancée en début d’année. Louis (fils) est brillamment entré à Centrale. En quelques semaines, la famille lorientaise est complètement recomposée. Blanche, la mère de René, vit aussi avec eux. Elle meurt à Lorient en avril 1939.
Hormis un bémol (février 1939), les inspections confirment l’aptitude de René à diriger un lycée dont la réputation n’est plus à faire :
« M. NAYEL est depuis octobre seulement Proviseur au lycée de Lorient où il a trouvé un lycée parfaitement organisé. Il semble s’acquitter parfaitement de ses fonctions. » (16 février 1938) « M.NAYEL est un proviseur consciencieux, appliqué, animé des meilleures intentions, parfois un peu hésitant et mou. Son établissement est bien tenu. » (14 février 1939) « M. NAYEL dirige correctement son établissement. Il a de réelles qualités de conscience et de sérieux. Il est estimé à Lorient. » (21 février 1940)
Mais la guerre éclate et la situation est difficile, a fortiori à Lorient dont les Allemands avaient décidé de faire une base stratégique pour la façade atlantique.
1940 : proviseur sous les bombardements
On est étonné du caractère laconique de l’appréciation du recteur en avril 1940 : « Proviseur consciencieux qui a eu de grosses difficultés à résoudre au début de cette année scolaire. J’ai pensé qu’il manque un peu de fermeté. »
Les difficultés ne sont rien moins que les dégâts d’un bombardement anglais en septembre 1940 !!…

« Monsieur le Recteur, Permettez-moi de vous présenter mes plus sincères remerciements pour la sympathie, l’intérêt et la bienveillance que vous avez témoignés au lycée de Lorient et à son proviseur à l’occasion des pénibles événements qui nous ont frappés. Cela a été pour nous tous un précieux réconfort et un encouragement à reprendre dans le plus bref délai possible notre tâche un moment interrompue. Veuillez agréer, Monsieur le Recteur, l’assurance de mon entier dévouement et de mon très respectueux attachement. R. NAYEL proviseur. » (9 octobre 1940)
« Monsieur le Recteur, Hier je vous ai adressé un rapport sur les bombardements quasi-quotidiens que fait subit à la ville de Lorient l’aviation anglaise. J’ajouterais qu’une bombe de gros calibre était tombée dans le jardin de la maison où je suis logé depuis que j’ai dû quitter le lycée à la suite de la destruction des bâtiments du 28 septembre. Il n’y a eu heureusement que de gros dégâts matériels, mais pas d’accidents de personne. Toutefois, ma fille, madame PHILIPPE, a été assez sérieusement commotionnée et nerveusement fatiguée par les craintes qu’elle a éprouvé pour ses enfants. Elle va être obligée de prendre un congé d’un mois au moins, peut-être plus et va conduire dès qu’elle le pourra ses enfants chez ses beaux-parents en Normandie. Dans ces conditions, la suppléance de monsieur FOURNIER va se trouver momentanément vacante et peut-être pourra-t-elle être donnée à monsieur GRUNCHEC ( ?). Ceci règlerait la question du professeur de lettres en surnombre dont je vous ai récemment parlé et au sujet de laquelle ce professeur a demandé à vous voir. Le proviseur, René NAYEL 24 novembre 1940 »
Le calme de René est sans nul doute la meilleure réponse aux circonstances : « M. NAYEL est un bon proviseur qui s’acquitte de ses fonctions avec beaucoup de conscience. » (l’inspecteur, 28 janvier 1941) - « Bon proviseur qui, au milieu de multiples difficultés et du danger, a réussi à maintenir la vie scolaire et à conduire très bien son établissement. Efforts et résultats tout à fait méritoires. » (le recteur, 12 mars 1941)
Les dernières semaines
Mais, pour René, les difficultés liées à l’Occupation s’ajoutent à des soucis de santé croissants. Il n’est pas en mesure de reprendre ses fonctions à la rentrée 1941.
[courrier dactylographié] « A monsieur l’inspecteur d’Académie, à Vannes. A l’issue de l’année scolaire 1940-1941, j’ai eu l’honneur de vous faire connaître l’état de fatigue dans lequel je me trouvais et les conseils de repos immédiat que me donnaient les médecins. Je crois même vous avoir confié les inquiétudes que me causaient ma santé. Toutefois j’espérais que le calme et la tranquillité que j’allais trouver à Laigle chez mes enfants amèneraient la détente voulue et me permettraient de reprendre en septembre. Malheureusement, mon état ne s’est pas amélioré et depuis mon retour à Lorient le 10 septembre, je souffre de crises extrêmement douloureuses de lumbago compliqué de troubles musculaires intercostaux et pneumoniques qui me rendent tout mouvement et tout travail régulier impossible.
L’organisation et la surveillance des épreuves écrites du baccalauréat sont assurées par Monsieur le Censeur d’accord avec la Directrice du Collège de Jeunes Filles.
Je devrais rependre le service au Lycée le 19 courant, je ne crois pas pouvoir le faire. Mais ce service pourra être assuré, si vous voulez bien y consentir ainsi que Monsieur le recteur par Monsieur BRAZIER, Censeur des Études, secondé par Monsieur RETHORET, Surveillant Général, aidés par la Dame Secrétaire.
A la rentrée des classes, je verrai quel sera l’état de mes forces et proposerai les mesures administratives nécessitées par la mise en marche de l’Établissement, le bien des études et des élèves et mes propres intérêts. Le proviseur, 17 septembre 1941. »
Deux nouveaux formulaires suivent pour demander la prolongation de l’arrêt, complétés de billets du censeur demandant d’être désigné explicitement pour l’intérim. Le dernier formulaire est accompagné du certificat du “docteur LETTRY, [attestant] que Monsieur NAYEL (…) est toujours en traitement pour pleurite des bases et tumeur cervicale, et qu’un nouveau mois de repos lui est indispensable. 23 octobre 1941”
Le congé est accordé… le 8 novembre (“avec traitement intégral”), mais René était mort dans la nuit du 30 au 31 octobre.

René est enterré à Lorient le 4 novembre 1941. Je ne sais pas si Louis, réfugié à Angers avec ses 3 filles depuis 1940, a pu venir à la sépulture.
Un avis d’obsèques et la liste des pièces demandées à Marie pour qu’elle puisse bénéficier d’une pension, ce sont les dernières pièces du dossier administratif de René NAYEL refermé en cette fin d’année 1941.
Quelques lettres attestent de liens qui perdurent entre Marie et ses neveux, mais dans les années d’après-guerre, les relations se distendent entre les cousins devenus adultes et engagés chacun dans leur propre aventure de vie.
En janvier et février 1943, 9 raids détruisent Lorient. Du lycée ne demeure que le portail. Après guerre, les cours reprennent dans des baraques avoir été hébergés à l’hôtel de la pomme d’or à Guémené-sur-Scorff du printemps 1943 à 1945. Dès 1946, l’Etat décide de créer à Lorient un vaste campus. Le projet sort de terre en 1953 sous la direction de Georges TOURRY urbaniste en chef de la reconstruction de la ville.
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Merci encore Elisabeth pour toutes ces informations et le travail que cela représente. La fin de mon grand père est bien triste.
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