Parmi les meubles réalisés par Auguste NAYEL, conservés dans la famille et répartis suite au partage de Louis NAYEL, une cheminée est revenue à Yves, le 3e de la fratrie. Il l’installa à Courcion (Charente-Maritime), la maison de sa femme Jacqueline BRANGER.
Surmonté d’une glace trumeau, la cheminée comporte deux piedroits et un manteau en bois sculptés, représentant une noce bretonne. Retrouvé parmi les nombreuses archives papier issues des malles conservées à Angers après le déménagement de 1937, le dessin grandeur nature de ce motif a été déposé aux archives municipales de Lorient en 2022.
Ces archives papier comptent aussi avec des centaines de photos. Photos de famille mais également clichés se rapportant aux travaux d’Auguste NAYEL. Trois d’entre elles allaient visiblement ensemble et représentent une cheminée, une armoire portant la mention « armoire de l’Exposition » et un lit.
Au dos de celle-ci, la mention manuscrite « Souvenir affectueux de l’auteur à Monsieur Nayel, sculpteur à Lorient, Rennes le 13 mai 1897. A. Coignerai ». Le regard de Marianne Raguenès qui mène actuellement une thèse sur le renouveau du mobilier au tournant des 19e et 20e siècle nous a soufflé qu’il s’agissait de l’ébéniste rennais COIGNERAI.



Quel est le lien entre tout ça ?
Le lit comme l’armoire affichent un style breton très affirmé, avec une débauche de quenouilles, et de scènes avec personnages : un chevalier en armure sortant d’une porte de ville fortifiée et brandissant un étendard, et…
une noce bretonne sur le chevet du pied de lit !
A y regarder de plus près, la noce du lit de Coignerai ressemble étonnamment à celle de la cheminée de Courcion, et à celle de la troisième photo. Les différences entre ces trois rondes de danseurs sont ténues : les personnages sont les mêmes mais séquencés en trois scènes sur le lit Coignerai, avec de légères variations aux extrémités du groupe, pour la mise en scène du public et l’intégration d’éléments végétaux.
On retrouve le même motif, néanmoins raccourci pour tenir dans une composition plus carrée sur le buffet aujourd’hui en collection au musée départemental breton de Quimper mais qui ornait la salle à manger des Nayel à Lorient.
Coignerai et Auguste Nayel, quels étaient leurs liens ?
Nayel fournissait-il à l’ébéniste des motifs ?
Réalisait-il les sculptures des meubles du Rennais ?



Une thèse en cours pour apporter des réponses
Elle-même ébéniste et restauratrice de meubles, Marianne Raguenès a engagé ce travail de thèse il y a 3 ans à l’Université de Bretagne Occidentale.
Ses travaux l’ont évidemment emmenée à explorer l’œuvre d’Auguste NAYEL, et plus largement les acteurs de la fabrique de meubles bretons au tournant les 19e et 20e siècle. Interactions, influences, collaborations : c’est l’objet de ses recherches.
Encore quelques mois de patience avant qu’elle ne livre ses analyses et que l’on en sache davantage sur la façon dont s’articulait cette production entre fabricants de meubles et sculpteurs, et sans doute les publics et amateurs de ces objets narratifs d’une identité régionale.
En attendant…
Les deux photos des meubles de Coignerai ont été remises au musée de Bretagne afin d’enrichir la documentation liée à cet entrepreneur. Si les interrogations demeurent autour de cette noce, la photo de l’armoire avec cette scène de chevalier apporte un complément de lecture au lit présent dans les collections et représentant le Combat des Trente.
N’hésitez pas non plus à compléter la lecture de cette article en explorant les collections en ligne du musée de Bretagne.