En triant de vieux dossiers, les bibliothécaires de Plœmeur ont retrouvé un livre de musique annoté au crayon du nom de “Nayel”, et nous ont proposé de le récupérer.
Un “B” mystérieux
Mais à quel NAYEL appartenaient ces partitions ?
L’annotation portée sur la partition de Macbeth de Verdi est précédée d’un B… En plongeant dans la généalogie, on trouve une Barbe NAYEL. Mais elle n’a vécu que quelques mois en 1772. On a aussi deux Bertrand. Fausse piste également : l’un est mort en 1688 ; l’autre né en 1766.
L’ouvrage n’est pas daté, mais l’impression, la reliure et les morceaux nous ramènent au dernier quart du 19e siècle - début du 20e…
A défaut d’un “natif B. NAYEL”, la probabilité qui s’impose est celle de l’initiale d’une épouse NAYEL.
Blanche musicienne ?
Sur la période considérée, une seule hypothèse fonctionne : Blanche FOUQUET, épouse Louis NAYEL.
Blanche est née à Thouars (Deux-Sèvres) le 5 mai 1857. Elle est la fille de Léopold FOUQUET (1835-1884), cabaretier et d’Adèle GOUSSE (née en 1836 de père inconnu). Le jour même de ses 17 ans, Blanche épouse Louis Vincent Emile NAYEL (1842-1894), 32 ans, employé de la Compagnie ferroviaire d’Orléans et en poste à Thouars (branche jaune), frère du sculpteur Auguste NAYEL (bleu) et de 3 ans son aîné.
Sans doute est-ce pour en raison de la distance et pour des raisons de santé que Joseph NAYEL et Constance GRANGER ne sont pas présents au mariage de leur fils ? Joseph meurt en effet quelques semaines plus tard en août 1874.
Le couple se déplace au gré des chantiers suivis au sein de la compagnie ferroviaire : Bressuire, Toulouse... Ils ont 3 enfants : Louis en 1875 (qui meurt à moins d’un mois), Auguste en 1877 et René en 1883. (La répétition des prénoms ne facilite pas le suivi de l’histoire… Les branches de couleurs ont pour objet d’éclairer le propos. Nous retiendrons que cette branche est la jaune).
René n’a pas 11 ans à la mort de son père le 11 janvier 1894. On ne sait pas précisément ce que font Blanche FOUQUET et ses deux fils après ce décès. En 1912, on la retrouve commerçante à Tours. Auguste (jaune) reste attaché à la région thouarsaise où il publie deux ouvrages - l’un consacré à la conspiration du général Berton de Saumur, et l’autre à l’église Saint-Médard de la ville. Il meurt juste après, en 1902 à 25 ans.
On peut imaginer qu’après la mort de son père, le jeune René soit venu au lycée à Lorient, sous la tutelle de son oncle Auguste (bleu). Cela expliquerait ses attaches morbihannaises et les liens forts avec son cousin Louis (bleu), le fils d’Auguste et filleul de son père. Il choisit en tout cas d’étudier, puis d’enseigner les mathématiques. comme son futur beau-père Joseph LE COZ.
Blanche reste veuve pendant 45 ans.
Elle meurt à son tour en 1939. Le Nouvelliste du Morbihan mentionne qu’elle a passé les dernières années de sa vie auprès de son fils - devenu proviseur du lycée - et de ses petits-enfants à Lorient.
En dépit de ces liens étroits, ni Louis, ni Blanche NAYEL (jaunes) ne sont identifiés dans les albums d’Antoinette GAUTHIER. René émarge en revanche dans les photos LE COZ.
Une silhouette et un visage pour la propriétaire de ce livre de musique ?
René NAYEL et Marie LE COZ se marient en 1912. Il est probable que cette photo ait été faite à l’occasion de leur fiançailles, et que la femme présente entre Antoinette GAUTHIER et Joseph LE COZ soit Blanche.
Blanche et Antoinette n’ont que 11 ans d’écart, mais les deux belles-soeurs semblent appartenir à deux générations différentes !

La présence de cette même femme sur cette autre cliché, entre Marie et René, parait confirmer cette hypothèse.
Réouvrons ce livre de musique
Il contient quelques dizaines de partitions de longueur variables. Ce qui semble être des airs à la mode, des pièces d’opéra comique, des fantaisies, des chansonnettes… composées par des noms à la mode au tournant des 19e-20e siècle : Rebsamen, Battman, Henrion, Nibu… Certaines pièces ont été créées dans la première moitié du 19e siècle (La fille du régiment, 1840), d’autres plus récemment (Rosalie, je t’en supplie 1882).




La reliure semble avoir été commandée par les soins de Blanche car les formats des partitions sont souvent différents. Plusieurs pièces portent des tampons de libraires bordelais ou parisiens. le titre “Piano et chant” est porté en lettres dorées sur la tranche.
Avis aux pianistes de la branche jaune !
Revenu dans la famille, ce livre a vocation à retrouver des musiciens.
Leur aïeule Blanche serait sans nulle doute heureuse de leur transmettre ce témoignage de ses goûts. On espère des intermèdes musicaux pour la prochaine cousinade !!
Merci à Evelyne BOURGOGNE, bibliothécaire de Ploemeur d’avoir pensé à nous et sauvé ce recueil, et à mon frère Jacques d’être allé le chercher.
Merci Elisabeth, je me régale à te lire (d'autant que j'arrive pas trop mal à me repérer parmi les homonymes : tes descriptions des liens familiaux entre nos ancêtres sont claires, dès lors que l'on a en visu l'arbre (ou plutôt l'extarait de l'arbre correspondant) !)
Un détail m'intrigue cependant au sujet de l'identifacation de Blanche sur les photos : si on admet l'hypothèse que la première photo date de 1911, cela signifie que Blanche FOUQUET est déjà veuve, son mari NAYEL étant décédé en 1894. Or la dame photographiée n'est pas habillée en noir (idem sur le second cliché). Est-ce envisageable de penser qu'elle n'ait pas porté le deuil de son mari très longtemps ?